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CHÉMOTE – LA SPÉCIALITÉ DU CHEF

« Moché-dit à Dieu : Qui suis-je, pour aborder Pharaon et pour faire sortir les enfants d’Israël de l’Égypte ? » (Exode 3-11)

Lorsque Dieu se dévoile à Moché, à travers le buisson ardent, Il lui demande d’aller libérer le peuple juif, alors asservi par l’Egypte. Moché, dans son extrême humilité, refuse cette mission et répond en ces termes : « Qui suis-je pour faire sortir les enfants d’Israël ? ». Dieu n’accepte pas son refus et lui rétorque (verset 12) : « C’est que je serai avec toi et ceci te servira à prouver que c’est moi qui t’envoie : quand tu auras fait sortir ce peuple de l’Égypte, vous adorerez Dieu sur cette montagne même ». Ce dialogue présente cependant une interrogation, quelle est donc la nature de cette réponse à la question de Moché « Qui suis-je pour faire sortir le peuple juif ? ». De quelle manière Dieu, par Ses propos, satisfait-Il Moché qui se demande pourquoi au sein de tout le peuple, c’est précisément lui qui a été choisi ?

Rebbi Avraham Cohen Yiçḥaki¹ z”l, explique, dans son livre Kaf HaCohen, qu’à travers Ses mots, Dieu dévoile à Moché la raison pour laquelle, il fut choisi : son humilité. La modestie, indispensable pour être un bon dirigeant, est justement la qualité que recherchait Dieu chez le sauveur du peuple juif. Dans sa réaction, face à l’appel de Dieu, Moché montre bien qu’il possède cette qualité essentielle, c’est pourquoi, Dieu lui dit : « ceci te servira à prouver que c’est moi qui t’envoie » – voici la preuve que c’est pour ton humilité que je t’ai choisi : « vous adorerez Dieu sur cette montagne même », à savoir, le Mont Sinaï, la plus petite des montagnes. De même que J’ai choisi le Mont Sinaï pour y donner la Thora, en raison justement de sa modeste taille, ainsi, toi Moché, Je t’ai préféré à un autre, grâce à l’humilité dont tu fais preuve.

La principale qualité d’un dirigeant, est de ne pas vouloir l’être, disait un grand philosophe, le fait même d’aspirer au pouvoir, est le premier indice d’un mauvais chef. L’humilité permet en effet au dirigeant de se placer sur un pied d’égalité avec ses fidèles et de cerner ainsi au mieux les besoins de sa communauté. A l’inverse, un homme imbu de sa personne ne se souciera guère des autres et hissé sur son piédestal il ne fera rien pour en descendre afin d’être en mesure de mieux les comprendre.

A ce propos, Rebbi Meir Mazouz² chlita, retrouve une brillante allusion à cette idée dans la cantillation hébraïque du verset : וַיֵּ֧רֶד מֹשֶׁ֛ה מִן־הָהָר אֶל־הָעָם – Moché descendit de la montagne vers le peuple (ibid. 19-14). Ce verset, qui incarne parfaitement la faculté du guide spirituel à « s’abaisser » au niveau de son peuple, est d’abord ponctué d’un Darga (litt. « degré ») puis d’un Tévir (litt. « brisé »). Cette ponctuation mélodique, traduit subtilement le devoir qu’a tout dirigeant de rompre le rang de sa hiérarchie et de se mettre au niveau de ses fidèles.

Aryé Bellity

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¹ Rebbi Avraham Cohen Yiçḥaki (1789-1864), surnommé le Michmérot Kéhouna du nom de son œuvre la plus célèbre, figure parmi les plus illustres sages de Tunis. Descendant d’éminents rabbins, son père, Rebbi Yiçḥak Ḥaï Cohen Yiçḥaki, est le fils de Rebbi Chémouel Cohen Yiçḥaki et sa mère est la fille de Rebbi Moché Krief. Elève de Rebbi Yéchouw’a Béssis, il siège à ses côtés au tribunal rabbinique de Tunis vers 1830, puis aux côtés de Rebbi Natan Borgel 2nd à partir de 1860. Il forme lui-même plusieurs disciples, dont Rebbi Chélomo Dana, Rebbi Ḥaïm Dawid Guedj, Rebbi Dawid Uzan et Rebbi Moché Berrebi. Il rédige plusieurs ouvrages dans tous les domaines de la Thora, parmi lesquels : Choulkhano Chél Avraham, ‘Éné HaCohen et Kétér Kéhouna.

² Rebbi Meir Mazouz, fils du juge rabbinique Rebbi Maçliyaḥ Mazouz, est né à Tunis en 1945. A la Yéshiva « Ḥévrat HaTalmoud », il suit les cours de Rebbi Yiçak Bouḥnik mais se forme principalement grâce à son père. Après l’assassinat de ce dernier en 1971, il monte en Israël accompagné de ses frères, et ensemble ils fondent la Yéshiva « Kissé Raḥamim » à Bené Vérak. Véritable génie en Thora et outre ses vastes connaissances dans le domaine de la loi juive, de la bible ou du Talmud, il écrit également sur différents sujets, comme la grammaire, l’astronomie, les mathématiques l’histoire ainsi que la poésie liturgique.


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